LITTORAL : PRESENTATION DE LA PIECE D’OR A COTONOU : LES APPRENANTS EN DIALOGUE AVEC LA LITTERATURE AFRICAINE
(Une immersion sensible dans l’univers de Ken Bugul pour éveiller curiosité, réflexion et plaisir de lire)
Ce vendredi 26 septembre 2025 après-midi, la section du Littoral de l’APFB a clôturé ses activités du mois de septembre par une rencontre littéraire consacrée aux élèves de terminale du CEG Zogbo et du Collège Marie-Stella, autour de l’œuvre La Pièce d’or de Ken Bugul. Animée par Monsieur Espérat Bocovo, enseignant de français au CEG Les Pylônes, la séance s’est tenue dans l’enceinte du CEG Zogbo à Cotonou, dès 16h, à l’issue des cours. Elle a offert aux apprenants l’opportunité d’entrer en dialogue avec une œuvre inscrite au programme, dans une atmosphère studieuse et stimulante, comme en témoignent les nombreuses prises de notes.
Par une intervention à la fois structurée, accessible et empreinte de rigueur pédagogique, Monsieur Espérat Bocovo a su retenir l’attention des apprenants. Son propos s’est ouvert sur une présentation succincte mais éclairante de Ken Bugul, abordant les grandes lignes de sa trajectoire personnelle et littéraire. Il a notamment souligné l’attachement profond de l’auteure au Bénin, pays où elle a résidé de nombreuses années, notamment à Porto-Novo, aux côtés de son époux béninois, médecin de profession, et même après le décès de ce dernier.
Dans un second temps, l’animateur s’est penché sur le paratexte de l’œuvre La Pièce d’or, mettant en exergue la richesse interprétative que recèle cette zone liminaire du livre. Il a ainsi démontré que la couverture, loin d’être un simple habillage graphique, constitue un espace de sens à part entière. On y distingue le nom de l’auteure, inscrit en bleu sur un fond jaune doré, suivi du titre en caractères rouges, couleur traditionnellement associée à l’amour et à la passion. Au centre de la page, juste au-dessus du logo de l’éditeur, apparaît une pièce d’or, image emblématique qui illustre le titre et suggère une quête ou une convoitise susceptible de traverser l’ensemble du récit.
Par cette analyse fine et méthodique, Monsieur Bocovo a invité les élèves à considérer le paratexte comme une porte d’entrée essentielle dans l’univers de l’œuvre. Il leur a montré que ces éléments, souvent négligés, peuvent pourtant éveiller la curiosité, orienter la lecture et enrichir la compréhension globale du texte.
Par ailleurs, l’animateur a livré une synthèse pénétrante de La Pièce d’or, en mettant en lumière la structure narrative centrée sur le parcours de Moïse, figure emblématique d’une jeunesse africaine en quête de sens, de justice et de transformation. Le récit, situé dans le pays fictif de Yaakar, dépeint une société en décomposition, marquée par un exode rural massif et une urbanisation chaotique. Au cœur de cette fresque sociale, Ba’Moïse, père du protagoniste, incarne la mémoire silencieuse des bouleversements contemporains. Moïse, quant à lui, porte les espoirs d’une génération instruite, animée par le rêve d’une Afrique affranchie des entraves néocoloniales et des illusions dogmatiques. Son engagement, d’abord fervent, se heurte aux réalités d’un système politique corrompu et d’une société indifférente, conduisant à une désillusion progressive. À travers cette trajectoire, Ken Bugul interroge les promesses non tenues de l’indépendance, les dérives du pouvoir, et la solitude des intellectuels dans un monde en perte de repères. Moïse devient ainsi le reflet d’une Afrique en tension, partagée entre mémoire blessée et aspiration à la renaissance. À travers cette trajectoire, Ken Bugul interroge les promesses non tenues de l’indépendance, les dérives du pouvoir, et la solitude des intellectuels dans un monde en perte de repères. Moïse devient ainsi le reflet d’une Afrique en tension, partagée entre mémoire blessée et aspiration à la renaissance.
Ce résumé a servi de tremplin à un échange intellectuel nourri autour des principales thématiques abordées dans l’œuvre. Les apprenants, dans une dynamique participative et réfléchie, ont pris la parole à tour de rôle pour commenter et interroger des problématiques majeures telles que la religion, l’homosexualité, l’échec des indépendances africaines, la satire de la classe politique, la pauvreté, l’exode rural, le sous-développement, entre autres.
Ces interventions ont témoigné d’une lecture attentive et critique de La Pièce d’or, révélant la capacité des apprenants à établir des passerelles entre la fiction littéraire et les réalités sociopolitiques contemporaines. L’activité a ainsi permis d’allier formation intellectuelle et éveil citoyen, dans un cadre propice à l’expression libre et à la réflexion approfondie.
Madame Samira Alidou, enseignante de français présente sur les lieux, a souligné à cette occasion que les apprenants doivent se distinguer par leur faculté de penser et de raisonner, en cultivant une posture réflexive. Selon elle, il leur revient de défendre des valeurs avec conviction, avoir des idéologies là où l’indifférence semble trop souvent prévaloir.
Au-delà de l’étude scolaire, cette activité de l’APFB a offert un espace de dialogue autour des enjeux culturels et sociaux portés par la plume de Ken Bugul. Cette initiative s’inscrit dans une dynamique pédagogique visant à revaloriser la littérature et à stimuler l’engagement intellectuel des jeunes de Cotonou. Consciente des défis posés par un environnement dominé par le numérique et marqué par une dispersion constante de l’attention, la section du Littoral s’est donnée pour mission de raviver le goût de la lecture chez les apprenants.
Le président honoraire, Monsieur Dr. Hubert Djogué, l’a rappelé avec force : il est impératif que les élèves lisent pour s’élever intellectuellement et culturellement. La rencontre s’est achevée dans une atmosphère conviviale, par une photo de famille réunissant les enseignants présents sur les lieux.
Carla M. L. SOSSOUHOUNTO
Présidente de la Section du Littoral
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